Honoraires des avocats : la révolution est en marche !
Les honoraires des avocats comme pour de nombreuses entreprises, sont soumis à des évolutions du marché, remettant en cause leurs modes traditionnels de pricing.
Tous les cabinets d’avocats sont désormais affectés par des tendances de fond qui se sont durablement installées sur le marché des services juridiques. C’est un marché sur lequel l’offre excède désormais la demande et, hormis sur les quelques nouveaux domaines du droit qui émergent au fil de l’évolution des technologies ou des réglementations, cette situation est amenée à perdurer. Car bien que la demande des entreprises et des particuliers continue d’augmenter, elle est de plus en plus satisfaite par de nouveaux entrants, tels que les acteurs de la legaltech ou d’autres professions réglementées, et de fait, la part de marché des cabinets d’avocats traditionnels tend à diminuer.
C’est ensuite un marché de plus en plus segmenté sur lequel il n’a jamais été aussi difficile de se différencier. L’expertise technique est un facteur de moins en moins différenciant dans l’achat de services juridiques, alors que le critère du prix est, lui, de plus en plus déterminant. Soumis à un environnement de plus en plus concurrentiel, les clients sont devenus très exigeants, poussent les prix à la baisse et remettent en cause la facturation au temps passé, tout en requérant davantage de transparence et de prévisibilité en matière de facturation.
Ces nouvelles conditions de marché sont à l’origine de la véritable bataille des prix qui sévit entre prestataires de services juridiques et qui se traduit dans la réalité, par une baisse tendancielle des prix sur une large gamme de prestations. Les cabinets d’avocats ont ainsi aujourd’hui du mal à maintenir leur taux horaire facial : les taux effectifs sont bien souvent inférieurs aux taux affichés, et ce, pour les associés comme pour les collaborateurs.
Il devient également de plus en plus difficile de facturer les prestations les plus standard : ces services basiques, à faible valeur ajoutée, ont aujourd’hui un prix de marché auquel il est devenu difficile d’échapper, les clients n’acceptant plus de payer les honoraires demandés par les avocats pour ce type de prestations. Par ailleurs, le recours croissant aux nouvelles technologies dans la production de services juridiques (modélisation et automatisation, algorithmes nourris d’intelligence artificielle…) fait que le nombre de ces prestations standard ne cesse d’augmenter au fil du temps. Contraints, par ces évolutions, de différencier leurs politiques de prix, les cabinets d’avocats pratiquent aujourd’hui des modes de pricing de moins en moins homogènes sur l’ensemble de leurs activités.
Tous, néanmoins, n’adoptent pas la même attitude face à cette guerre des prix. La plupart conservent une approche très attentiste et traditionnelle du pricing : ils comprennent, se plaignent, tentent de maîtriser au mieux leurs coûts, gèrent leurs prix au jour le jour… et ont en fait du mal à maintenir leur marge. Certains prennent des demi-mesures : ils s’emparent de cette problématique, y réfléchissent, forment leurs associés à la négociation et au pricing… mais n’opèrent au final que des ajustements sans réelle velléité de tout remettre à plat. Ils continuent d’axer leur politique de prix sur le temps passé, représentant certainement un bon outil de gestion, mais pas assez sophistiqué pour une politique de prix fondée sur la valeur ajoutée.
Enfin, des cabinets précurseurs ont adopté une approche plus économique du pricing. Ils n’hésitent pas à questionner leur business model, à revoir de fond en comble la manière de délivrer leurs services et à élaborer de nouvelles politiques de prix en fonction de la valeur ajoutée de chaque service et du type de clients. Cette approche requiert de travailler, dans un cabinet, sur plusieurs dimensions : la gouvernance prix (qui détermine les prix ? qui est habilité à les revoir à la hausse ou à la baisse ?), l’exécution et la gestion des projets (comment s’assurer de ne pas perdre d’argent à chaque stade du processus ?) et le volet « analytics » (comment exploiter l’ensemble des données du cabinet pour élaborer des référentiels de prix et analyser la rentabilité par client ?).
Cette approche, résolument plus économique du pricing, implique d’apprendre à dégager et à mettre en avant la valeur ajoutée de chacun de ses services, en intégrant une démarche de changement bousculant la culture traditionnelle des cabinets d’avocats.
@patrickbignon
En savoir plus sur https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-180184-honoraires-des-avocats-la-revolution-est-en-marche-2159917.php#5cFEoWLO4xLyxuhH.99
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